31 Mar 2015 Itinéraires mystérieux. La route du vin entre Venise et Léonard de Vinci
Venise émerveille et envoûte surtout pour la touche de mystère qui entoure son histoire, une histoire encore en grande partie à explorer.
On peut découvrir Venise en redécouvrant d’anciens cépages et c’est exactement ce qu’entend faire le Consorzio Vini Venezia par le biais du projet qu’il a mis sur pied dans le but de découvrir l’origine, la provenance et les caractéristiques des anciennes variétés présentes dans la Lagune, en en étudiant l’ADN, en les échantillonnant et en les propageant pour créer des plantations pour constituer une banque génétique des cépages, résultats de cette étude.
Les échantillonnages ont été faits dans 11 localités situées entre la lagune nord (île de Torcello, de Vignole et de S. Erasmo), le cœur de Venise et la lagune sud (île du Lido Alberoni, île Pellestrina et île San Lazzaro degli Armeni qui était tellement aimée par le grand poète romantique Byron et où se dresse le monastère des pères mekhitaristes, entouré d’un immense jardin célèbre également pour ses roses).
La cartographie des anciens pieds de vigne de Venise devrait porter à la réalisation de deux vignobles: l’un à Torcello (déjà fini) avec la réhabilitation de rangées de pieds de vigne datant des années Soixante-dix et l’autre, dans le couvent des Carmelitani Scalzi. L’île de Torcello, presque entièrement déserte et baignant dans une atmosphère envoûtante de silence est l’une des îles les plus isolées de la lagune de Venise: on y arrive après un arrêt à Burano, l’île célèbre pour ses maisons bigarrées typiques, le campanile penché de l’église Saint Martin, et la dentelle à l’aiguille. La cathédrale de Torcello, dédiée à Notre-Dame de l’Assomption a été bâtie aux alentours de 639 et est l’un des bâtiments vénitiens-byzantins parmi les plus anciens existant encore dans la lagune.
Le directeur scientifique du projet de récupération des cépages vénitiens est le professeur Attilio Scienza de l’université de Milan,
Grâce au soutien du professeur Scienza, le travail de récupération des anciens vignobles situés entre Venise et les îles de la lagune a pu être entrepris en faisant des recherches dans des couvents, des potagers, des jardins et d’autres lieux dans l’espoir de retrouver des exemplaires ayant échappé aux ravages du phylloxéra (le puceron dévastateur qui s’attaque aux racines des vignes européennes).
Recréer les anciens vignobles, restituant ainsi à Venise son patrimoine vitivinicole, signifie également récupérer la mémoire de son glorieux passé, son rôle de port commercial animé qui le distinguait depuis des temps lointains et l’atmosphère des ses calli (les rues typiques de Venise encastrées entre deux rangées continues de bâtiments) et de ses typiques auberges de charme, ou locande.
Cette “mystérieuse” route du vin nous conduit incroyablement à Léonard de Vinci.
La trait d’union est Attilio Scienza, le personnage principal d’un roman historique, écrit sous forme de roman policier qui met au premier plan un ancien vignoble et dont la scène est l’Expo 2015. Il s’agit du roman intitulé Il vigneto Da Vinci écrit par Giovanni Negri. Au centre du roman policier il y a la disparition d’Attilio Scienza et l’ancien vignoble, tel que le dit le titre, celui qui semble avoir appartenu à Léonard De Vinci, tel qu’on le racontait à la fin de la Renaissance. Pendant son séjour à Milan, faisant partie des artistes qui fréquentaient la cour de Ludovic Marie Sforza dit le More , l’artiste et homme de science toscan demanda au duc, en échange de son travail, une vigne dans la maison où il résidait, Casa Atellani près de la cathédrale de Milan. Léonard avait voulu une vigne à la fois parce qu’il aimait le vin et parce que la vigne suscitait son intérêt scientifique. En effet, certains de ses dessins montrent des prototypes de réservoirs de ciment et de cuves pour le vin.
Casa Atellani est située Corso Magenta, à deux pas de l’église Santa Maria delle Grazie où le grand génie de la Renaissance a peint la célèbre fresque figurant la Cène. Identifié comme Malvasia di Candia, ce cépage a été replanté et “renaîtra” à temps pour l’Expo 2015 lorsque les visites guidées seront ouvertes à tous et en illustreront les adversités au fil des siècles, du XVIème à nos jours.
Le projet du Consorzio Vini Venezia, entrepris en 2010 en collaboration avec l’Université de Padoue, l’Université de Milan, le centre de recherche pour la viticulture – CRA-Vit de Conegliano – et d’autres sujets a été également raconté dans le livre Il vino nella storia di Venezia, sous la direction de CarloFavero, qui comprend les contributions de plusieurs auteurs parmi les plus grands connaisseurs de l’histoire du rapport entre Venise et le vin et qui constitue une base incontournable pour une histoire moderne de l’œnologie de la cité lagunaire.